On associe rarement l’univers du ZD et la communauté gaming. Pourtant, les deux sujets font appel à la créativité et à l’innovation. Alors, les gamers sont-ils si hermétiques que cela aux enjeux environnementaux? Et si au contraire de nouvelles idées émergeaient en investissant d’autres plateformes pour rejoindre ce nouveau public? C’est le pari que s’est lancé Cindy Trottier en démarrant Les Zécogeeks au mois de novembre 2020.
Le projet
Les Zécogeeks, c’est quoi?
C’est à la fois des moments de jeux en streaming et un podcast rassembleur où on peut discuter de diverses thématiques, dont l’art, le zéro déchet et autres.
Le podcast « La tête dans les poubelles » amène une réflexion avec les autres streamers, sous forme collaborative avec un esprit positif, dans une ambiance de respect et de discussion. Les sujets abordés sont variés : désencombrement, minimalisme, zéro déchet, etc.
Le podcast est structuré en 3 temps : d’abord une discussion libre sur les défis des gens, puis l’actualité écolo sur un ton positif et enfin « la montée de lait » autour d’une anecdote qui m’a énervée ou un sujet qui me tient à cœur. Par exemple, je n’hésite pas à dénoncer le marketing vert. Dans une prochaine phase, j’aimerais ajouter un moment avec des invités passionnés.
Pendant les temps de jeux en streaming, le contenu est beaucoup plus relax. L’idée est de prendre du plaisir en jouant aux jeux vidéo rétro pour « casser la glace », c’est un prétexte pour lancer la discussion. Je joue principalement à Animal Crossing New Horizon, Zelda, les jeux Nintendo rétros, des petits jeux de simulateurs de jardinage, etc.
Par exemple, en jouant à Zelda : Breath of the Wild la semaine passée, dans une scène de chasse, j’expliquais que je suis végétarienne et que même dans le jeu je ne veux pas tuer tous les animaux, même si c’est un monde imaginaire, certains réagissent par des blagues, d’autres plus sérieusement.
Comment est née l’idée de cette initiative?
Avant la pandémie, j’étais déjà beaucoup sur Twitch. En deux ans, j’ai même développé des amitiés, car j’aimais beaucoup entendre certains streamers en background pendant que je travaillais et parfois je demandais des conseils pour mes vidéos Youtube. Je trouvais un réel soutien dans la communauté de Twitch Québec, beaucoup d’entraide. Alors je me suis demandé : j’incarne ce paradoxe d’être à la fois zéro déchet et gameuse, avec beaucoup de jugement sur les réseaux traditionnels. Pourtant, en 2020, surtout depuis la pandémie, beaucoup de monde a rejoint Twitch pour briser la solitude, y compris des personnes engagées. Il est temps d’arrêter de croire que la technologie est incompatible avec les sujets environnementaux! Alors j’ai eu l’idée de créer ma propre communauté pour amener de nouveaux sujets sur Twitch.
Quel est l’objectif de ce projet?
C’est de briser l’isolement et de rendre le zéro déchet accessible à un nouveau public. Avec mon projet Tendance Radis, j’ai montré qu’il est possible d’être zéro déchet en région, mais aujourd’hui je veux aller plus loin, parler ZD dans un contexte encore différent.
À titre personnel, mon objectif est avant tout d’avoir du plaisir, sans stress de performance, avec un focus sur la créativité avant tout. J’ai été activiste et militante, maintenant je veux amener le ZD par un moyen plus léger. Avec le streaming, je suis en contact direct avec le public, ils peuvent poser leurs questions et partager leur expérience.
Quel est le lien avec tes autres activités, notamment le Circuit Zéro Déchet?
C’est très différent du format des conférences. Le Circuit Zéro Déchet va continuer à exister et mes conférences aussi. Avec les Zécogeeks, je fais la promotion de mes autres activités, c’est un outil pour me développer et aussi un outil de sensibilisation pour les plus jeunes.
Le lien vers le site du Circuit Zéro Déchet est sur la page Twitch des Zécogeeks, j’ai également programmé des notifications automatiques dans le tchat pour le promouvoir. Par exemple, pendant « l’actu écolo », je lis à haute voix les billets de mon blog.
La plateforme
Quelles différences constates-tu avec les autres plateformes de communication utilisées habituellement?
Si je compare aux réseaux sociaux habituels, la différence est vraiment la communauté elle-même, il y a une ambiance d’entraide et de partage entre les streamers. C’est une plateforme pour les créateurs, les artistes. Par exemple, il y a beaucoup de musiciens, d’artistes, de philosophes, etc. C’est plus libre, il y a moins de jugement.
Une grosse différence c’est aussi qu’il n’est pas possible de commenter après les sessions en direct, contrairement à Facebook. C’est aussi pour ça qu’il y a moins de polémiques. C’est super difficile de percer sur Instagram alors que sur Twitch, personnellement, je ne le vois pas comme un monde de compétition, même si certains sont très compétitifs sur Twitch. Tout dépend de nos objectifs.
Pour les personnes introverties, c’est parfois très difficile de créer des liens, de réseauter. Sur Twitch, c’est plus facile, c’est à la fois un espace sécuritaire et un formidable outil pour aborder un sujet aussi important. Comme dans tous réseaux sociaux, il y a des trolls et des gens malintentionnés, mais il est possible de les bannir assez facilement à l’aide de modérateurs. D’ailleurs, l’OMS vient même de publier un article sur le fait que les jeux vidéo sont positifs pour la santé mentale pendant la pandémie.
Le public
Penses-tu que le rayonnement du zéro déchet pourrait évoluer grâce à ce type de projets, en étant moins associé au rôle de « la ménagère écolo »? Réussis-tu à aller chercher plus d’hommes?
Je suis surprise de voir que ce sont encore beaucoup de femmes qui me suivent alors que la communauté masculine est plus nombreuse sur Twitch. La plupart des hommes qui me suivent sont des étudiants en philosophie et théâtre, car mes contenus sont propices aux échanges sur ces sujets.
Ce n’est pas du tout la même gang que sur mes autres plateformes. Certains followers Facebook sont venus au début, mais ils sont repartis, notamment quand je suis devenue affiliée. Le fait que Twitch appartienne à Amazon en a rebuté certains. Pourtant, toutes les plateformes peuvent être sujettes aux mêmes critiques. Si je ne vais pas dans l’antre de la bête, je ne peux pas combattre la bête donc je suis obligée de piler sur mes principes par certains aspects pour rejoindre plus de monde. La grande majorité de mes followers sur Twitch sont nouveaux, ils ne me connaissent pas d’ailleurs.
Sais-tu si tu as du public régulier ou à chaque fois ce sont des personnes différentes?
Ceux que j’ai réussi à accrocher reviennent et sont abonnés. J’en ai déjà une dizaine. Leur abonnement leur permet de supprimer la publicité et de me soutenir.