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Comprendre le cycle de vie pour mieux consommer

Comprendre le cycle de vie des biens que nous consommons peut nous aider à faire des choix plus éclairés, en considérant le coût réel de nos achats. Car au-delà du prix que nous payons, les coûts sociaux et environnementaux des objets neufs devraient désormais faire partie des critères de décision lorsque vient le temps de combler nos besoins.

L’analyse du cycle de vie

Le CIRAIG, Centre international de référence sur le cycle de vie des procédés, produits et services, définit l’analyse du cycle de vie comme une méthode qui permet d’évaluer les impacts environnementaux associés à toutes les étapes de la vie d’un produit, de l’extraction des matières premières à l’élimination ou au recyclage. Les analyses du CIRAIG sont basées sur des mesures rigoureuses de l’empreinte de chacune des étapes sur :

  • La santé humaine,
  • Les écosystèmes,
  • Les changements climatiques,
  • L’épuisement des ressources,
  • L’’acidification et l’eutrophisation aquatique.

Évidemment, en tant que consommateur ou consommatrice, nous n’avons pas accès aux outils sophistiqués du CIRAIG ou de centres universitaires spécialisés. Retenons que l’essentiel est de comprendre l’origine des objets de notre quotidien, afin d’acquérir des réflexes de consommation responsable, tant sur le plan éthique qu’environnemental.

Les étapes du cycle de vie

Découvrons les étapes du cycle de vie, dans la perspective où chacune des composantes d’un produit a suivi ce cycle. Imaginez une voiture, qui contient plus de 30 000 pièces… ça donne le goût de conserver notre bagnole quelques années de plus!


Les cahiers du développement durable – L’ANALYSE DU CYCLE DE VIE D’UN PRODUIT OU D’UN SERVICE

L’extraction de matière première : des ressources naturelles détruites

Depuis plusieurs décennies, nous extrayons trop de ressources naturelles, souvent pour fabriquer du jetable. Les procédés d’extraction sont alors de plus en plus compliqués et polluants. Il faut creuser plus loin, plus grand, raser plus de forêts, détruire plus d’habitats. De plus, il ressort de ces procédés des matières contaminées qu’on dissémine dans la nature, affectant l’air, les sols, les lacs, les rivières, la faune et la flore environnante.

La fabrication : consommation et contamination des eaux

Pour la transformation des matières, l’assemblage et la fabrication des objets, d’énormes quantités d’eau potable sont requises (par exemple, entre 7000 et 11000 litres pour un jeans), plusieurs produits toxiques sont utilisés et des tonnes de déchets sont produits. En outre, lorsque nous choisissons un bien sur la seule base de son prix bas, il y a de fortes chances que celui-ci ait été fabriqué dans une usine alimentée aux énergies fossiles, dans un endroit où les normes environnementales et de protection des travailleurs et travailleuses sont presque inexistantes.

Le transport et la distribution : plus de kilomètres qu’on peut le croire

Les différents matériaux et composantes d’un produit sont souvent extraits, transformés et assemblés dans des pays, voire des continents différents. Conséquemment, ces matières ou ces pièces sont chacune transportées plusieurs fois sur de très longues distances par bateaux, avions, ou camions, contribuant de façon importante au dérèglement climatique. Par ailleurs, l’étiquette d’un objet ne présente que le pays où a lieu la dernière étape d’assemblage, d’emballage ou d’importation. Notre cellulaire par exemple, composé de 70 matériaux, a déjà fait le tour du monde avant de se rendre jusqu’à nous!

L’utilisation : consommation d’énergie

On pourrait croire que les choses que nous possédons ne sont plus source de pollution. Or, ce n’est pas le cas des véhicules et équipements qui fonctionnent à essence et qui émettent du CO2 lors de la combustion, ou aux piles électriques dans plusieurs de nos appareils. D’autre part, le lavage trop fréquent de nos vêtements est une source de contamination des nappes phréatiques et des cours d’eau.

La mise au rebut : source de problèmes environnementaux

Quand nos objets ne servent plus et deviennent des déchets, il faut encore les transporter vers des sites où ils seront brûlés ou enfouis. Peu importe la méthode, il y a émission de gaz à effet de serre. Des sites d’enfouissement, s’échappe notamment du méthane, un gaz beaucoup plus nocif que le CO2. Considérons également les effets de la déforestation, nécessaire pour l’agrandissement sans fin de ces sites. Nos systèmes efficaces de ramassage des déchets à domicile nous ont éloignés de cette réalité, comme si les déchets disparaissaient par magie! Et le recyclage? Malheureusement, ce n’est qu’une infime partie des objets de notre quotidien qui sont recyclables et recyclés.

Sans compter que le déchet ultime n’est que la pointe de l’iceberg. Dans le documentaire étatsunien The Story of Stuff, qui a remporté un succès planétaire en 2007, on apprend qu’en moyenne, pour chaque poubelle remplie de déchets à la maison, 70 poubelles de déchets ont été générées tout au long du cycle de vie, et que la majorité des articles fabriqués aujourd’hui seront jetés à l’intérieur de six mois.

Une croissance infinie sur une planète finie

Comme le souligne le Global Footprint Network, nous consommons les ressources à un rythme beaucoup plus rapide que la Terre ne peut les reconstituer. Il en résulte non seulement une crise climatique, mais également une profonde crise d’extinction et de biodiversité.

Source : Institut EDDEC, 2018. En collaboration avec RECYC-QUÉBEC. Reproduction autorisée

De son côté, Yves-Marie Abraham, dans son livre sur la décroissance Guérir du mal de l’infini, démontre que notre modèle économique linéaire repose sur la prémisse erronée que les ressources sont infinies et que les écosystèmes auraient une capacité sans limite à absorber les déchets produits. De surcroît, la croissance économique, obsession des gouvernements actuels, n’est possible qu’en présence d’une augmentation sans fin de la production de biens selon ce cycle linéaire destructeur. Abraham démontre que ce modèle ne remplit pas ses promesses d’enrichissement collectif, puisqu’il ne sert qu’une minorité, creusant les inégalités entre les mieux et les moins nantis, entre les humains d’aujourd’hui et ceux de demain.

Qu’est-ce qu’on peut faire ?

CONSOMMEZ MOINS. 

Résister aux stratégies marketing servant à alimenter la bête insatiable de la croissance économique. Avant d’acheter, se poser quelques questions : 

  • En ai-je vraiment besoin?
  • Ai-je déjà quelque chose qui répond à la même fonction? 
  • D’où vient ce produit et quelle est son empreinte? 
  • Est-ce que le plaisir procuré par cet achat équivaut à son impact social et environnemental? 
  • Pourrais-je louer, emprunter, ou trouver dans le marché de la seconde main?

CONSOMMER MIEUX. 

  • Choisir des biens plus durables et fabriqués près de chez soi, lorsque possible à partir de matériaux locaux et recyclés, ou issus de l’économie circulaire
  • Encourager les petites entreprises qui ont un impact social et environnemental positif, même si cela implique parfois de payer un peu plus. 
  • Entretenir, réparer et prolonger la durée de vie de nos choses et éviter les articles à usage unique.
 

De l’espoir…

Comme l’a énoncé le GIEC, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat dans son dernier rapport : « Nous avons besoin d’une transformation radicale des processus et des comportements à tous les niveaux : individus, communautés, entreprises, institutions et gouvernements. Nous devons redéfinir notre mode de vie et de consommation. » Parce qu’ensemble, si on s’y met, on peut avoir un impact positif sur la crise du climat et de la biodiversité. « En termes de réchauffement climatique, chaque dixième de degré va faire une différence », soutient le GIEC.

En guise de conclusion, citons Sophie Brochu, PDG d’Hydro-Québec, lors d’une entrevue accordée à la chaîne YouTube l’Alternateur: « Le geste de consommation que nous posons est le plus puissant pour sauver la planète! » Dans un mot d’encouragement adressé aux jeunes du Québec, elle leur dit qu’ils ont la capacité de changer le cours des événements, non seulement en décriant ce qui ne fonctionne pas, mais en adoptant les comportements de consommation qui vont faire bouger les choses. Jeunes ou moins jeunes, à nous de jouer! 

 

 

PAR NATHALIE AINSLEY POUR L’ASSOCIATION QUÉBÉCOISE ZÉRO DÉCHET

De la même autrice :

Sources :

Les Cahiers du Développement Durable, L’analyse du cycle de vie. L’analyse du cycle de vie – Les cahiers du DD – outil complet 

CIRAIG, Centre international de référence sur le cycle de vie des procédés, produits et services. CIRAIG  

Suzuki D., Hanington, I. Fondation David Suzuki. (Octobre 2020) Nos enfants n’ont pas à payer pour nos excès. Nos enfants n’ont pas à payer pour nos excès – Fondation David Suzuki

Abraham, Y.M. (2019). Guérir du mal de l’infini, Écosociété.

Radio-Canada, (juin 2021) L’humanité à l’aube de retombées climatiques cataclysmiques L’humanité à l’aube de retombées climatiques cataclysmiques | Radio-Canada.ca

Chaine Youtube l’Alternateur. (2021) Entrevue avec Sophie Brochu. Réflexion sur l’environnement et notre avenir au Québec avec Sophie Brochu ! – YouTube

ADEME, France – Agence de la transition écologique. Le revers de mon look. https://librairie.ademe.fr/consommer-autrement/1524-revers-de-mon-look-9791029710520.html

ADEME, France – Agence de la transition écologique. Le cycle de vie d’un produit, qu’est-ce que c’est? Le cycle de vie d’un produit, qu’est-ce que c’est ? – YouTube

The Story of Stuff project Homepage – Story of Stuff