Le plastique à usage unique est un fléau auquel on doit impérativement trouver des alternatives. Les bioplastiques se présentent comme une option plus écologique, mais le sont-ils vraiment ? À travers l’information contradictoire qui circule, il est souvent difficile de s’y retrouver et de comprendre les enjeux subtils entourant ces produits. Ces plastiques sont-ils plus écologiques que les plastiques standards ? Comment doit-on les trier ? Cet article tente de faire la lumière sur ces matériaux.
D’abord, le terme bioplastique est très large et s’intéresse autant aux matières premières composant le matériau qu’à son traitement en fin de vie. Il regroupe les plastiques biosourcés et ceux qui sont biodégradables.
Les matériaux biosourcés sont ceux qui proviennent de ressources renouvelables. Cette appellation fait donc référence à la provenance de la matière, et non à la façon de s’en départir en fin de vie. Les plastiques biosourcés peuvent ainsi être recyclables, biodégradables, compostables ou n’avoir aucune de ces propriétés. Ils ont comme origine des produits agricoles ou forestiers, contrairement aux plastiques traditionnels d’origine pétrochimique. La Fondation David Suzuki soulève cependant des questions éthiques liées à l’utilisation de matière première comestible pour la production d’emballages. En effet, les conséquences néfastes des plastiques biosourcés peuvent être les mêmes que celles des biocarburants, soit la flambée du coût des aliments, la dégradation des sols causés par la monoculture ainsi que la déforestation pour permettre l’expansion des zones agricoles.
Le terme biodégradable s’intéresse à la fin de vie du matériau, peu importe la provenance des matières premières le composant. Selon l’Office québécois de la langue française (OQLF), un matériau biodégradable est celui « qui se décompose en éléments divers sous l’action d’organismes vivants ». Il est important de comprendre qu’aucune notion de temps n’est associée à cette définition. C’est pourquoi Compost Montréal nous met en garde contre ce terme qui semble écologique, mais apporte, en réalité, peu d’informations relativement à comment et en combien de temps s’effectue la décomposition.
Au moment de s’en départir, on ne doit pas placer les plastiques biodégradables au bac de compost, puisqu’ils prennent trop de temps à se décomposer. mais ils ne sont pas recyclables non plus. Malheureusement, comme ils ne sont pas recyclables non plus, ces plastiques vont à la poubelle.
Le terme compostable est quant à lui plus restrictif et il existe des normes qui régissent cette appellation. Pour être qualifié de compostable, un matériau doit atteindre un stade de décomposition de 60 à 90 % avec des morceaux de 2 mm maximum dans un délai de 180 jours. Il est à noter que les matériaux compostables sont tous biodégradables, tandis que les matériaux biodégradables ne sont pas nécessairement compostables.
L’un des plastiques compostables que l’on retrouve le plus fréquemment est l’acide polylactique (PLA), fait à base d’amidon de maïs. Il en existe aussi d’autres sortes, faits d’amidon de pomme de terre ou de bagasse, un résidu de la culture de la canne à sucre. Ce sont donc aussi des plastiques biosourcés.
Les plastiques compostables ont évidemment été conçus pour être compostés. Ce qui semble une évidence s’avère pourtant un casse-tête. Pour être traitée comme prévue, cette matière requiert des installations particulières, qui offrent une température et un taux d’humidité propices à sa décomposition. Dans la très grande majorité des centres de compostage du Québec, que ce soit par du compostage extérieur ou dans des centres de biométhanisation, ces conditions ne sont pas réunies. Le plastique compostable y est donc retiré, puisqu’il ne peut atteindre un seuil de dégradation acceptable. Le plastique biodégradable, et souvent aussi celui compostable, n’ont donc pas leur place au compost. Une enquête de RAD nous apprend toutefois que les possibilités de traitement des plastiques compostables varient d’une installation à l’autre. Il arrive que les fines couches de PLA laminé sur un contenant de carton et parfois même des contenants de plastique entièrement de PLA soient acceptés. Par contre, il faut s’éloigner des grands centres urbains pour que ce soit le cas.
La confusion au sujet du traitement des plastiques compostables et biodégradables vient de leur classement dans le type numéro 7, qui regroupe tous les plastiques qui ne sont pas inclus dans les catégories 1 à 6. Ces matériaux sont très variés et ont donc des compositions, propriétés et débouchés variables, malgré le fait qu’ils portent tous le même numéro. Même si Recyc Québec nous dit que le plastique numéro 7 peut aller au bac de récupération, il faut faire attention. C’est vrai pour certains plastiques, mais pas tous ! Assurez-vous que ce que vous mettez dans votre bac ne porte pas la mention compostable ou biodégradable, car dans ce cas, ils ne sont pas recyclables.
Les plastiques biodégradables ou compostables placés dans le bac de récupération et acheminés au centre de tri sont très difficiles à départager des plastiques recyclables. Ils se mêlent donc aux autres plastiques et diminuent la qualité de la matière transformée.
Les études de cycles de vie présentent des conclusions partagées sur le PLA et les plastiques compostables en général, le pointant parfois comme pire que les autres plastiques. Tout dépend de la capacité du système à leur donner le traitement en fin de vie pour lequel ils ont été conçus.
En conclusion, le plastique biosourcé est une belle alternative aux produits pétroliers, s’il ne contribue pas à l’accaparement des terres agricoles. Nous devrions par contre nous méfier des autres bioplastiques. Effectivement, beaucoup de désinformation et d’éco-blanchiment sont liés aux plastiques biodégradables et compostables, qui ne sont au final pas nécessairement plus écologiques que les plastiques traditionnels. Il est dommage de voir plusieurs commerces tenter de faire leur part pour adopter des pratiques écoresponsables et tomber dans le piège des fournisseurs qui leur vendent du rêve. Tout ceci démontre qu’aujourd’hui encore, le processus de traitement des déchets est méconnu et mériterait d’être mieux communiqué, à la fois à la population et aux entreprises.
Bref, aussi souvent que vous le pouvez, évitez les contenants à usage unique ! Ce sera bien plus simple et vous aurez la certitude d’avoir fait le bon choix.
Par Eugénie lessard pour l’association québécoise zéro déchet
Ces articles pourraient aussi vous intéresser :
Je récupère, tu récupères, ils recyclent
Où vont nos masques?
De la même autrice:
Aménager une cour écoresponsable
Un potager urbain à partir de presque rien
Des repas écolos même au resto
SOURCES
Compost Montréal. (s.d.). Actualités Compost Montréal. https://www.compostmontreal.com/actualites.html
Corniou, M. (2019, 14 novembre). Les bioplastiques, arnaque ou bonne idée?. Québec Science.
https://www.quebecscience.qc.ca/environnement/bioplastiques-arnaque-ou-bonne-idee/
Dugal, M. (2021, 3 juin). Ce plastique compostable et biodégradable qui ne l’est pas tant. [entrevue]. Dans Moteur de recherche. Radio-Canada. https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/moteur-de-recherche/segments/entrevue/357886/compost-bac-brun-recyclage-organique
Éco Entreprise Québec. (s.d.). Bac-à-Bac. https://bac.eeq.ca/serie
Éco-quartier Mercier-Hochelaga-Maisonneuve. (2018, 19 septembre). Les sacs compostables et le processus du compostage. http://ecomhm.com/news/sacs-compostables-et-le-processus-du-compostage/
Grain. (2013, 18 mars). Il faut arrêter d’accaparer les terres pour produire des biocarburants. https://grain.org/fr/article/entries/4654-il-faut-arreter-d-accaparer-les-terres-pour-produire-des-biocarburants
Hénault-Éthier, L. (2020, janvier). Mémoire présenté par la Fondation David Suzuki à la Ville de Montréal à propos de son plan Montréal, objectif zéro déchet. [Consultation publique sur le Projet de Plan directeur de gestion des matières résiduelles 2020-2025]. http://ville.montreal.qc.ca/pls/portal/docs/PAGE/COMMISSIONS_PERM_V2_FR/MEDIA/DOCUMENTS/MEM_FDS_ZERO_20200122.PDF
Lapointe, R. (2012, 6 septembre). Bioplastiques biodégradables, compostables et biosourcés pour les emballages alimentaires, distinctions subtiles mais significatives. [mémoire de maîtrise, Université de Sherbrooke]. https://www.usherbrooke.ca/environnement/fileadmin/sites/environnement/documents/Essais2012/Lapointe_R__06-09-2012_.pdf
Malik, K. et Schiebel, N. (2018). Plastique compostable » pas encore inclus dans la collecte des résidus alimentaires. https://preventioncdnndg.org/eco-quartier/fr/plastique-compostable-pas-encore-inclus-dans-la-collecte-des-residus-alimentaires/
Office québécois de la langue française. (s.d.). Le grand dictionnaire terminologique. http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/
RAD. (2021, 16 juin). Est-ce que la vaisselle compostable est vraiment compostée?. [vidéo]. Radio-Canada. https://ici.radio-canada.ca/info/videos/media-8462331/est-ce-que-vaisselle-compostable-est-vraiment-compostee
Recyc-Québec. (s.d.). Qu’est-ce qui va dans le bac?. https://www.recyc-quebec.gouv.qc.ca/citoyens/mieux-recuperer/quest-ce-qui-va-dans-le-bac